Communiqué de presse
Les jeunes diplômé.es résidents en QPV accèdent difficilement à un emploi cadre
A l’occasion de la troisième édition du Sommet de l’Inclusion Économique organisée ce mardi 28 novembre par la Fondation Mozaïk au ministère de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, l’Apec, partenaire de l’événement, dévoile, en phase avec sa mission d’intérêt général une étude sur l’insertion des jeunes diplômés issus des QPV sur le marché de l’emploi.
Malgré un marché de l’emploi cadre qui maintient sa dynamique et alors que les entreprises sont à la recherche de compétences, les jeunes des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) peinent encore à accéder à l’emploi, a fortiori sur des postes de cadres.
Les jeunes diplômés des QPV font face à de nombreux freins et préjugés qui entravent leur insertion professionnelle. Mais ce n’est pas une fatalité, nous devons nous mobiliser pour favoriser les conditions d’une bonne insertion et permettre à tous les talents d’accéder à l’emploi cadre. C’est le rôle de l’Apec qui, portée par sa mission de service public, a choisi d’engager des actions concrètes, sur le terrain, avec d’autres acteurs de l’emploi et de la formation. C’est aussi la mission de l’Apec, à travers son observatoire, d’identifier les discriminations pour mieux les combattre.Laetitia Niaudeau, directrice générale adjointe de l'Apec
L’étude de l’APEC souligne la nécessité de continuer à travailler sur de multiples leviers pour parvenir à une réelle égalité de traitement dans l’accès à l’emploi : sensibilisation et formation des entreprises au recrutement et au management inclusifs, accompagnement des jeunes pour leur orientation et leur insertion, mentorat et création de réseau qui font partie intégrante du dispositif proposé par la Fondation Mozaïk. Aujourd’hui, nous réunissons à Bercy plus de 50 entreprises et institutions partenaires pour réduire cette inégalité et répondre aux besoins du marché du travail. Ensemble, travaillons à ce que ce Mouvement de l’Inclusion économique prenne encore davantage d’ampleur pour créer une juste place pour tous et une société plus inclusive ! Ensemble, nous pourrons atteindre les 100 000 recrutements inclusifs.Saïd Hammouche, Président de la Fondation Mozaïk
L’accès au 1er emploi, un parcours semé d’embûches
- Les jeunes des QPV rencontrent des difficultés dès l’accès à l’enseignement supérieur. Ils soulignent notamment des conditions d’apprentissage défavorables, mais aussi des infrastructures dégradées. S’ajoutent à cela des difficultés pour trouver un stage ou une alternance, tremplins pourtant primordiaux au 1er emploi.
- Ils se sentent également plus vulnérables face à la succession de contrats précaires qui les exposent au chômage.
- Ces entraves accentuent bien souvent un phénomène d’autocensure, particulièrement lors des premières années professionnelles, certains diplômés mentionnant un sentiment d’illégitimité lié à leur quartier d’origine.
Encore aujourd’hui je m’autocensure, c’est ancré en nous. Je n’ai pas eu les mêmes activités, les mêmes hobbies […]. J’ai un statut de cadre, mais je n’encadre pas. On me l’a proposé, je n’ai pas voulu, je ne m’en sentais pas capable.Souad, 34 ans, Bac+5, cadre, région Île-de-France
« Pas la bonne origine, pas les bons codes, pas le bon réseau »
- L’étude met en exergue les discriminations liées à l’origine (réelle ou supposée, couleur de peau, religion) subies par les jeunes des QPV. Elles sont renforcées par une stigmatisation, souvent implicite, basée sur des préjugés liés au lieu d’habitation et à l’origine géographique : manque d’infrastructures, faible capital culturel, et économique.
- Les diplômé.es des QPV disent manquer de modèles inspirants, et déplorent l’absence des codes attendus. Ils mettent en lumière leur méconnaissance du monde professionnel et de ses usages, ainsi qu’un faible réseau qui renforcent leur manque de confiance, freinant leur ambition professionnelle.
En QPV il y a peu d’avocats, ingénieurs ou médecins. Ça reste des exceptions, ce sont plutôt des ouvriers, intérimaires, hôtesses de caisse, pas des emplois qui font rêver, surtout des métiers pour subvenir à leurs besoins. On a un frein en plus en QPV, on ne se projette pas tout de suite.Adèle, 32 ans, Bac+3, non-cadre, région Île-de-France
Plus de concession et d’engagement pour surmonter les freins à l’embauche
- Les diplômés résidents dans des QPV n’ont le choix que de déployer des stratégies spécifiques pour surmonter les difficultés rencontrées dans leur parcours. Ils se démarquent notamment lors de la recherche d’emploi, par une grande proactivité : soin extrême apporté à la candidature, formations ou ateliers divers, candidatures spontanées, dépôts de CV en physique, rappels systématiques des entreprises ou encore recours à un accompagnement. Cet engagement se traduit aussi par davantage de flexibilité sur les critères de postes, les prétentions salariales, etc.
- Il leur arrive de dissimuler leurs origines ou leurs lieux d’habitation pour « normaliser » leur candidature et adopter un « CV anonyme » avec invisibilisation de l’adresse, le retrait de la photo, etc. Certains jeunes vont même jusqu’à travailler leur élocution, adapter leur langage ou modifier leur apparence.
A un moment donné j’avais peur de mettre ma ville. Pas mon nom et mon prénom parce que ça va mais la ville oui. […] voir 93 dans le CV ça faisait peut-être insécurité, manque de connaissances, de compétences […] Je faisais attention à la tenue vestimentaire, à l’élocution, bien préparer mes sujets, apprendre par cœur la fiche de poste parce que je savais que je n’avais pas le droit à l’erreur en fait !Patricia, 34 ans, Bac+5, cadre manager, région Île-de-France
Face à ces constats, l’Apec se mobilise pour permettre l’accès au marché du travail aux publics plus fragilisés, tels que les jeunes des QPV, à travers des actions concrètes, menées en partenariat avec des acteurs de l’emploi (NQT, Fondation Mozaïk).
Zoom sur :
>Jeunes en Scène : le 31 octobre 2023 à la Philharmonie de Paris, l'Apec proposait à 65 jeunes et 30 décideurs RH de se rencontrer autrement. L’opportunité pour ces jeunes accompagnés par les équipes de l’Apec et des coachs artistiques de monter sur scène pour présenter leur profil professionnel. Objectif : encourager les entreprises à aborder le recrutement de manière différente. Plus de 40 % des jeunes présents à l’événement étaient résidents des QPV, grâce notamment au partenariat entre l’Apec et la mairie de la Courneuve.
>Sésame Jeunes Talents : lancée en 2016 par l’Apec Provence-Alpes-Côte d'Azur et ses partenaires locaux, cette opération met en place des actions de parrainage au profit des jeunes diplômé.es des QPV. Les quatre premières éditions ont permis d’accompagner 162 jeunes diplômé.es : entre 77 % et 92 % d’entre eux ont pu, 9 mois après la fin du dispositif, s’insérer sur le marché du travail, créer une entreprise ou poursuivre une formation.
>Novapec : Le programme de soutien financier dédié à l’innovation sociale de l’Apec finance
- le programme Déclics numériques mené par Diversidays, pour favoriser le retour vers l’emploi dans les métiers de l’IT, en particulier lorsqu’ils sont discriminés et sous-représentés dans ces fonctions, avec une attention particulière pour les cadres des QPV et/ou en situation de handicap.
- le projet porté par Social Builder qui consiste à coconstruire une méthodologie d’approche pour remobiliser les femmes de moins de 30 ans résidentes en QPV pour favoriser leur insertion professionnelle et leur employabilité, en s’appuyant sur les acteurs de terrain.
Méthodologie
Les analyses présentées dans cette étude s’appuient sur une enquête qualitative menée entre avril et juillet 2023 par l’Apec et le Credoc.
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